Définition de SOT, OTTE

DÉFINITIONS - PROVERBES - REMARQUE - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : so, so-t' ; le t se lie : un so-t animal ; des grammairiens disent que le t de sot se prononce, quan

DÉFINITIONS

1
Qui est sans jugement.
On peut être sot avec beaucoup d'esprit, et on peut n'être pas sot avec peu d'esprit
de François, duc de LA ROCHEFOUCAULD dans Réfl. div. p. 119
Aussi sot par derrière que par devant
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Bourg. gent. III, 4
Ceux-là [occupés à la philosophie, aux sciences] sont les plus sots de la bande, puisqu'ils le sont avec connaissance, au lieu qu'on peut penser des autres qu'ils ne le seraient plus s'ils avaient cette connaissance
de Blaise PASCAL dans Pens. IV, 2, éd. HAVET.
J'aime le bel abbé de l'attention qu'il paraît avoir pour vos affaires, et du soin qu'il a de me chercher pour en discourir avec moi, qui ne suis pas si sotte sur cela, à cause de l'intérêt que j'y prends, que sur toutes les autres choses du monde
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 21 août 1676
De Paris au Pérou, du Japon jusqu'à Rome, Le plus sot animal, à mon avis, c'est l'homme
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Sat. VIII
Si vous voyez deux chiens.... qui se mordent et se déchirent, vous dites : voilà de sots animaux ; et vous prenez un bâton pour les séparer
de Jean de LA BRUYÈRE dans XII
Je serais fâché que vous crussiez que je suis assez sot pour ne rien voir, quoique je sois assez honnête pour ne rien dire
de Antoine HAMILTON dans Gramm. 8
Il n'est pas sot, ce Valère ; il n'est parbleu pas sot !
de Alain René LESAGE dans Crisp. riv. de son maître, sc. 13
Si l'abbé Coyer parle comme il écrit, il doit être fort aimable ; mais ma mère, qui avait vu Despréaux, disait que c'était un bon livre et un sot homme
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. d'Argental, 6 juill. 1761
Madame [mère du régent], ajoutait-il [Clermont-Tonnerre], est le plus sot homme du monde, et Monsieur la plus sotte femme
de Charles Pinot, sieur DUCLOS dans Oeuv. t. V, p. 238
Sémantique : Familièrement. Je ne suis pas si sot, c'est-à-dire c'est une sottise, une imprudence que je ne commettrai pas.
Je n'y vas point, je ne suis pas si sot
de Jean de LA FONTAINE dans Fabl. II, 2
Nature : Substantivement.
La sage se sait vendre où la sotte se donne
de Abbé Mathurin RÉGNIER dans Sat. XII
Parce que Junius Brutus contrefit le sot, ils ont eu de la défiance de tous les sots ; ils se sont figuré que tous les niais imitaient Brutus
de Jean-Louis GUEZ de BALZAC dans De la cour, 3e disc.
Sache le sot qui s'en scandalise, que tout homme est sot en ce bas monde, aussi bien que menteur ; les uns plus, les autres moins ; et moi qui vous parle, peut-être plus sot que les autres
de Paul SCARRON dans Rom. com. I, 9
M. Ravaud, votre ami, m'a prié de lui en servir [de caution], et je l'ai fait pour l'amour de vous, quoique je sache que le titre de fidejussoribus dans le droit est appelé le titre des sots
de Gui PATIN dans Lett. t. II, p. 24
Un sot n'a pas assez d'étoffe pour être bon
de LA ROCHEFOUC dans Max. 387
Quand le malheur ne serait bon Qu'à mettre un sot à la raison, Toujours serait-ce à juste cause Qu'on le dit bon à quelque chose
de Jean de LA FONTAINE dans Fabl. VII, 7
Dans tous les beaux-arts, c'est un supplice assez fâcheux que de se produire à des sots
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Bourg. gent. I, 1
Et c'est mon sentiment qu'en faits comme en propos La science est sujette à faire de grands sots
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Femm. sav. IV, 3
Le plus grand des maux est les guerres civiles, elles sont sûres, si on veut récompenser les mérites.... le mal à craindre d'un sot qui succède par droit de naissance n'est ni si grand ni si sûr
de Blaise PASCAL dans Pens. V, 3, édit. HAVET
Un sot trouve toujours un plus sot qui l'admire
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Art p. I
Un sot ni n'entre, ni ne sort, ni ne s'assied, ni ne se lève, ni ne se tait, ni n'est sur ses jambes, comme un homme d'esprit
de Jean de LA BRUYÈRE dans II
Les fautes des sots sont quelquefois si lourdes et si difficiles à prévoir, qu'elles mettent les sages en défaut et ne sont utiles qu'à ceux qui les font
de Jean de LA BRUYÈRE dans XI
Un sot est celui qui n'a pas même ce qu'il faut d'esprit pour être fat
de Jean de LA BRUYÈRE dans XII
Ma séve est passée, je n'ai plus ni fruits ni feuilles.... les sots et les fanatiques auront bon temps cet automne et cet hiver ; mais gare le printemps
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. d'Argental, 28 août 1760
L'expérience ne fait-elle pas voir que presque tous les sots ne valent rien ?
de COMTE DE CAYLUS dans Mém. de l'acad. de Troyes, Oeuvr. t. XII, p. 91, dans POUGENS.
Je m'étais persuadé que j'avais du génie ; au bout de ma ligne, je lis que je suis un sot, un sot ! un sot !
de Denis DIDEROT dans le Neveu de Rameau.
Il [Galilée, à ceux qui lui demandaient à quoi servaient les recherches mathématiques] répondait que la géométrie servait principalement à peser, à mesurer et à compter : à peser les ignorants, à mesurer les sots, et à compter les uns et les autres
de Jean Le Rond D'ALEMBERT dans Élog. Bernoulli.
Maître sot, se dit à un inférieur qu'on rabroue.
Holà, maître sot ! vous savez que je vous ai dit que je n'aime pas les faiseurs de remontrances
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Don Juan, I, 2
Un bon sot, un homme qui croit ce qu'on lui dit, qui se laisse attraper.
J'étais un bon sot, moi, de croire, quand tu m'as parlé de prendre des précautions, que....
de Antoine HAMILTON dans Gramm. 3
C'est un sot en trois lettres, se dit pour appuyer sur la qualification....
Vous êtes un sot en trois lettres, mon fils
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Tart. I, 1
Sémantique : Familièrement. Par ellipse, quelque sot, c'est-à-dire quelque sot le ferait, le dirait, le croirait.
Moi, monsieur ! quelque sot : la colère fait mal
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans l'Ét. II, 7
Orgon : Certes, je t'y guettais. - Dorine : Quelque sotte, ma foi !....
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Tart. II, 2
2
Il se dit des choses au même sens.
Et toi, que me veux-tu, Ridicule retour d'une sotte vertu ?
de Pierre CORNEILLE dans Rodog. V, 1
La sotte vanité nous est particulière ; Les Espagnols sont vains, mais d'une autre manière : Leur orgueil me semble, en un mot, Beaucoup plus fou, mais pas si sot
de Jean de LA FONTAINE dans Fabl. VIII, 15
Le sot projet qu'il [Montaigne] a de se peindre !
de Blaise PASCAL dans Pens. VI, 33
Toute la dignité de l'homme est en la pensée ; mais qu'est-ce que cette pensée ? qu'elle est sotte !
de Blaise PASCAL dans ib. XXIV, 58 bis.
Rien n'est si sot que d'aimer avec excès un enfant qui n'est point à moi
de Françoise d'Aubigné, marquise de MAINTENON dans Lett. à l'abbé Gobelin, 14 juillet 1669
L'amour-propre est, hélas ! le plus sot des amours
de DESHOUL. dans t. I, p. 103
3
Fâcheux, désagréable, ridicule, en parlant de choses.
Morgué ! voilà une sotte nuit, d'être si noire que cela
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Georg. Dand. III, 1
Nous travaillons à finir une sotte affaire avec un président, pour recevoir le reste du payement d'une terre
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 27 nov. 1675
Il y a eu une sotte occasion dans l'armée du maréchal d'Humières, où Nogaret a été dangereusement blessé
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 2 août 1689
Je suis persuadée qu'une femme indifférente trouvera peu d'hommes assez hardis pour lui faire de sottes propositions
de Mme DE PUISIEUX dans Ridic. à la mode, p. 21, dans POUGENS
....Et déjà je m'étonne Qu'il ne vous ait point fait quelque sot compliment
de Jean-François REGNARD dans Ménechmes, III, 11
La sotte guerre de Rousseau et de moi continue toujours ; j'en suis fâché, cela déshonore les lettres
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. Cideville, 25 sept. 1736
4
Embarrassé, confus.
Sans ce trait fallot Un homme l'emmenait, qui s'est trouvé fort sot
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans l'Ét. II, 14
Ils furent bien sots, lorsque, s'apprêtant à se saisir de mes effets, ils apprirent qu'ils étaient à couvert
de Alain René LESAGE dans Guzm. d'Alf. VI, 3
On me mande qu'on est tout consterné et tout sot à Paris
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. d'Argental, 14 oct. 1759
Voulez-vous voir un personnage embarrassé ? placez un homme entre deux femmes avec chacune desquelles il aura des liaisons secrètes, puis observez quelle sotte figure il y fera
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Ém. V
Comme il restera sot ! - Edmond : Bien sot de l'aventure
de A. DUVAL dans Fille d'honneur, III, 8
Nature : Substantivement. Comme un sot, avec confusion.
Sans l'inspiration subite de la lettre, il faut l'avouer, j'étais éconduit comme un sot
de Pierre Augustin Caron de BEAUMARCHAIS dans Barb. de Sév. III, 3
5
Nature : Au féminin, follement amoureuse.
Si bien donc qu'elle est sotte de vous
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans l'Et. I, 6
Que Marinette est sotte après son Gros-René !
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans le Dép. IV, 4
6
Sémantique : Par euphémisme, il s'est dit d'un homme trompé par sa femme.
Épouser une sotte est pour n'être point sot
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans École des femmes, I, 1
Se croyant aussi sot qu'il méritait de l'être, [il] Voulut perdre sa femme ; et, d'après ton rapport, Il la fit mourir
de MONTFLEURY dans Femme juge et partie, I, 1
Nature : Substantivement.
Il veut, à toute force, être au nombre des sots ; Il se maintient cocu....
de Jean de LA FONTAINE dans Coupe.
Elles font la sottise, et nous sommes les sots
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Sgan. 17
Elle ? elle n'en fera qu'un sot, je vous assure
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Tart. II, 2
J'irais, par ma constance aux affronts endurci, Me mettre au rang des saints qu'a célébrés Bussi ! Assez de sots sans moi font parler dans la ville
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Sat. VIII
7
Le sot, un des noms vulgaires de la raie oxyrrhynque, dite aussi sotte et alène ; c'est la raie au long bec de certains auteurs.
8
Mère sotte, titre d'une sotie, satire de l'Église.
La plus célèbre de toutes les soties est celle de Mère sotte, composée et représentée par ordre exprès de Louis XII
de Jean-François MARMONTEL dans Oeuv. t. X, p. 156

PROVERBES

1
À sotte demande point de réponse.
Elle a raison : à sot compliment il faut une réponse de même
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans l'Avare, III, 11
2
De sot homme sot songe, qu'il dorme ou qu'il veille un sot est toujours un sot.
3
Sot qui s'y fie, il faut prendre ses précautions.
4
Sottes gens, sotte besogne, on ne peut rien tirer de bon des sottes gens.
On ne parle que des dissipations de cette maison [des Mirepoix], depuis les plus grandes jusqu'aux plus petites choses : sottes gens, sotte besogne
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 21 août 1675

REMARQUE

1
On peut dire à quelqu'un sans l'offenser : vous êtes un fou. Mais on ne peut pas lui dire sans l'outrager : vous êtes un sot.

HISTORIQUE

1
XIIe s.
Coment sunt devenuit si sot li saige home qui un petit enfant aorent ?
de ST BERN. dans p. 550
Apostoles, fait il, cist rois nous tient por sot
dans Sax. XVII
2
XIIIe s.
On dist piecha [il y a longtemps], que cius [celui-là] a grant disette de sot, qui de lui meymes le fait
dans Chr. de Rains, p. 173
3
XIVe s.
Qui de trestout se taist, il doit bien pais avoir ; Et si ne sont pas bon à dire tout li voir [toutes les vérités] ; Hastive gent et sot n'aront jà grant avoir
dans Beaud. de Seb. X, 1062
Et sachiez que widecos sont les plus sos oyseaulx du monde
dans Modus, f° CXXXII, verso
4
XVe s.
.... Les sotes vierges, Qui n'avoient oille ne cierges, Quant aux noces entrer cuiderent
de Eustache DESCHAMPS dans Poésies mss. f° 490
L'un est menestrel, et l'autre a Semblant de faire le sot saige [ce qu'on a nommé plus tard un fou] ; Ces deux ont par tout l'avantaige, L'un en janglant, l'autre à corner
de Eustache DESCHAMPS dans ib. f° 313
Tu [le vin] faiz batailles et rios ; Un saiges homs est par toy sos, Car il pert son sens par yvresse
de Eustache DESCHAMPS dans ib. f° 377
Et si ay veu ailleurs escript Un proverbe qui sur ce dit Que les grans noces font li sot, Et li saige hommes sans escot
de Eustache DESCHAMPS dans Miroir de mariage, p. 29
Les compaignons de Colomiers en Brie se sont acoustumez de eslire entre eulx un personnaige propre pour estre et avoir en tiltre le nom de prince des sotz....
de Victor Henri-Joseph Brahain, dit DU CANGE dans princeps.
Le duc de Bourgogne, voyant leur sotte et rude maniere [des Flamands], et que ce qu'il disoit riens ne luy prouffitoit, par belles et douces paroles les commença à rappaiser
de Enguerrand de MONSTRELET dans t. I, ch. 78, p. 131, dans LACURNE
5
XVIe s.
Qu'un gros sot en rimes compose Des vers par lesquels il me peint
de Clément MAROT dans III, 158
Ces sottes arguties
de Michel de MONTAIGNE dans I, 190
Ses livres [de Ctésias] sont pleins de toute sorte de fables, non seulement incroyables, mais aussi folles et sottes
de Jacques AMYOT dans Artax. 1
Tous les assistens dirent que c'estoit une sotte mal apprise, qui ne sçavoit ny bien ny honneur
de Jacques AMYOT dans ib. 39
Le fol est sot quand et quand ; mais tout sot n'est pas fol
de Henri ESTIENNE dans Apol. d'Hérod. p. 18, dans LACURNE
Pourquoy est-ce quand on nomme homme sot, il s'estime coqu ?
dans Moyen de parvenir, p. 369, dans LACURNE
Tellement que ce docte Homere Semble estre fils de sotte mere, Qui jadis rimoit en dormant, Ou plus tost dormoit en rimant
de DU VERDIER dans Biblioth. p. 237
Femme sotte se cognoist à la cotte
de Randle COTGRAVE dans
Sot amy, c'est un ennemy
de Antoine LE ROUX DE LINCY dans Prov. t. II, p. 417

ÉTYMOLOGIE

1
Picard, sot, fou, mains sottes, mains engourdies par le froid ; wallon, so, sott ; espagn. et portug. zote ; angl. et anglo-saxon, sot ; holl. zot ; bas-lat. sottus. Origine inconnue.